Avis 20231204 Séance du 30/03/2023

Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 3 mars 2023, à la suite du refus opposé par le président de l'université Jean Moulin Lyon 3 à sa demande de communication des documents suivants : 1) la liste des invités politiques ayant intervenu dans le cadre de la faculté de droit sur une période de 20 ans ; 2) tout document, tout statistique, tout élément de budget et tout document financier concernant ces invités en ce compris les structures parallèles telles que les associations étudiantes ayant bénéficié de la location, à titre gratuit, des locaux pour des fins de réception d'invités politiques. La commission, qui a pris connaissance des observations du président de l'université Jean Moulin Lyon 3 en réponse à la demande qui lui a été adressée, rappelle que le droit d’accès doit rester compatible avec le bon fonctionnement des services et cède devant les demandes abusives, auxquelles les administrations ne sont pas tenues de répondre, en application du dernier alinéa de l'article L311-2 du code des relations entre le public et l'administration. Toute demande portant sur une quantité importante de documents ou le fait pour une même personne d’adresser soit plusieurs demandes à une même autorité soit des demandes multiples formulées à l’identique à plusieurs autorités, ne sont pas nécessairement assimilables à des demandes abusives. Une demande peut être regardée comme abusive, au sens de ces dispositions, lorsqu'elle a pour objet de perturber le bon fonctionnement de l’administration sollicitée. Relèvent de cette catégorie les demandes récurrentes, portant sur un volume important de documents traitant, le cas échéant, de la même affaire, que le service sollicité est dans l’incapacité matérielle de traiter, ou les demandes portant sur des documents auxquels le demandeur a déjà eu accès. La commission fonde également son appréciation sur les éléments portés à sa connaissance par le demandeur et l'administration quant au contexte dans lequel s'inscrit la demande et aux motivations qui la sous-tendent. Par sa décision du 14 novembre 2018 ministre de la culture c/ Société pour la protection des paysages et l’esthétique de la France n° 420055, 422500, le Conseil d’État a jugé que revêt également un caractère abusif, les demandes qui auraient pour effet de faire peser sur l’autorité saisie une charge disproportionnée au regard des moyens dont elle dispose. La commission précise, en outre, que lorsque les éléments d'information non communicables contenus dans un document dont la communication est sollicitée sont très nombreux et qu'il est possible de se procurer les éléments communicables autrement, la communication des documents après occultation des éléments non communicables peut être légalement refusée, au motif qu'elle ferait peser sur l'administration une charge excessive, eu égard aux moyens dont elle dispose et à l'intérêt que présenterait, pour les requérants, le fait de bénéficier, non de la seule connaissance des éléments communicables, mais de la communication des documents occultés eux-mêmes (CE, 27 mars 2020, Association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon-St-Exupéry, n° 426623). La commission rappelle, en outre, que le droit à la communication des documents administratifs est un droit objectif. L'intérêt d'une communication pour le demandeur ou ses motivations ne peuvent donc, en principe, pas fonder un refus de communication. Elle relève, toutefois, que, dans un avis n° 20220207 du 10 mars 2022, elle a fait évoluer sa doctrine en retenant désormais que, dans le cas particulier où l’autorité saisie fait valoir que la communication des documents sollicités ferait peser sur elle une charge de travail disproportionnée au regard des moyens dont elle dispose, il y a lieu de prendre en compte, pour apprécier le caractère abusif de la demande, non plus seulement le fait que la communication a objectivement perdu son intérêt, mais également l’intérêt qui s’attache à la communication pour le demandeur, ainsi que, le cas échéant, pour le public. Cette position a été confirmée par le Conseil d’État (CE, 17 mars 2022, n° 449620). La commission relève, à titre liminaire, que sur une période récente, le demandeur a adressé un nombre très important de demandes de communication de documents à deux établissements particuliers et qu’il a déjà été mis en garde au moins deux fois, par la commission, au sujet des demandes à caractère abusif. Il apparaît par ailleurs à la commission, d’une part, qu’eu égard à l’étendue de son libellé, portant sur tout document sur une période de 20 ans, et à son imprécision, la présente demande impliquerait que l’administration procède à des recherches importantes en vue d’identifier et de sélectionner les renseignements susceptibles d’y répondre. Elle relève, d’autre part, que le demandeur ne fait état d'aucun intérêt particulier qui s'attacherait à la communication de ces documents. La commission estime, ainsi, compte tenu de la nature de la demande, de ses difficultés de traitement, des moyens dont dispose l’établissement universitaire saisi, de l’absence d'intérêt particulier avancé par le demandeur et du climat de tension délétère et injustifié qu’il entretient, que la demande présentée par Monsieur X présente un caractère abusif.