Conseil 20113097 Séance du 26/07/2011
- caractère communicable à des tiers d'informations estimées de nature environnementale obtenues, sous couvert de confidentialité, par l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), dans le cadre de sa mission de service public, et protégées par le secret industriel et commercial.
- compte tenu des conditions d'obtention de ces informations, peut-on considérer les documents qui les contiennent comme des documents administratifs au sens de l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978 ?
- faut-il prendre en considération le contexte qui a conduit à l'élaboration ou le contexte de l'utilisation de ces informations pour en déduire la nature environnementale de celles-ci ?
La commission d'accès aux documents administratifs a examiné dans sa séance du 26 juillet 2011 votre demande de conseil relative au caractère communicable à des tiers d'informations estimées de nature environnementale, obtenues, sous couvert de confidentialité, par l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), dans le cadre de sa mission de service public, et protégées par le secret industriel et commercial. Vous soulevez notamment sur les questions suivantes :
- compte tenu des conditions d'obtention de ces informations, peut-on considérer les documents qui les contiennent comme des documents administratifs au sens de l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978 ?
- faut-il prendre en considération le contexte qui a conduit à leur élaboration ou le contexte de l'utilisation de ces informations pour en déduire la nature environnementale de celles-ci ?
A titre liminaire, la commission relève qu’aux termes de l’article L. 1313-1 du code de la santé publique, l'agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) est un établissement public de l'Etat à caractère administratif qui, dans son champ de compétence, « a pour mission de réaliser l'évaluation des risques, de fournir aux autorités compétentes toutes les informations sur ces risques ainsi que l'expertise et l'appui scientifique et technique nécessaires à l'élaboration des dispositions législatives et réglementaires et à la mise en œuvre des mesures de gestion des risques. (…) ».
La commission rappelle par ailleurs qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 17 juillet 1978 : « Sont considérés comme documents administratifs (…), quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission. (…) ».
Au cas d’espèce, la commission constate que le document sur lequel porte votre demande de conseil, et dont elle a pu prendre connaissance dans une version provisoire, est un rapport établi par l’ANSES dans le cadre de sa mission de service public en vue d’expertiser les risques que présente pour la santé humaine la diffusion dans l’environnement du diméthylfumarate et des substances homologues par l’intermédiaire des produits de consommation importés de pays dans lesquels ils ont été traités par ce fongicide dont l’usage est interdit dans l’espace économique européen. Ce rapport revêt dès lors le caractère d’un document administratif dans son intégralité, y compris pour les mentions correspondant aux informations reprises de documents transmis par l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS). En effet, la circonstance que ces informations ont été initialement recueillies par celle-ci dans le cadre de l’instruction d’une demande d’autorisation de recherche biomédicale, à d’autres fins que celles de l’expertise confiée à l’ANSES, et qu’elles ont fait l’objet d’un accord de confidentialité signé entre cette dernière et la société qui les a fournies à l’AFSSAPS, sont sans incidence.
Par ailleurs, la commission constate que les informations en cause, qui portent sur la toxicité de substances dont l’ANSES étudie les risques que présente leur diffusion dans l’environnement, sont dans cette mesure relatives à des émissions de substance dans l’environnement, au sens de l’article L.124-5 du code de l’environnement. Or, la commission rappelle que si les dispositions du I et II de l’article 6 de la loi du 17 juillet 1978, auxquelles renvoie l’article L. 124-4 du même code, ne permettent pas la communication de documents lorsque celle-ci porterait atteinte au secret en matière commerciale et industrielle, il en va autrement lorsque les documents sollicités comportent des informations relatives à des émissions dans l’environnement. En effet, dans cette hypothèse, en application du II de l'article L. 124-5, une demande de communication ne peut être rejetée, après avoir apprécié l’intérêt d’une communication, conformément au I de l’article L.124-4, que dans le cas où sa consultation ou sa communication porte atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, au déroulement des procédures juridictionnelles ou à la recherche des infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales, ou à des droits de propriété intellectuelle. Les stipulations de l’accord de confidentialité conclu par l’ANSES avec la société qui a fourni à l’AFSSAPS les documents d’où sont tirées ces informations ne sauraient faire obstacle à l’application de ces dispositions législatives, qui assurent au surplus en droit français la transposition de la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement.
La commission considère donc que les passages du rapport d’expertise qui comportent ces informations sont communicables à toute personne qui en fait la demande, sous la seule réserve des mentions qui seraient couvertes non par le secret en matière commerciale et industrielle seulement mais par des droits de propriété intellectuelle et à condition, s’agissant de ces dernières, que l’intérêt de leur communication, apprécié par l’ANSES conformément au I de l’article L.124-4 du code de l’environnement, ne suffise pas à justifier la levée de cette protection.